Alice
Nom : Alice Kœune
Âge : 37 ans
Lieu de résidence : Saint-Symphorien
"La muco, c'est triple peine"
Tout parent s'inquiète lorsqu'un bébé tombe malade. Mais lorsque les problèmes perdurent et qu'aucun médecin n'est en mesure d'en expliquer la cause, l'inquiétude se transforme rapidement en angoisse. Dans le cas d'Alice, le processus a duré 4 ans. C’est le temps que cela a pris pour qu’enfin tombe le diagnostic : mucoviscidose. Les premières années de la petite fille furent donc compliquées avec de nombreuses maladies et plusieurs hospitalisations. Elle n'en est pas sortie traumatisée, même si lorsqu’elle fréquentait l’école primaire, chaque journée démarrait par une séance d’aérosols et se terminait par la visite du kiné et une deuxième séance d’aérosols. Le tout accompagné d’un petit cocktail de médicaments – une vingtaine par jour, notamment sur le temps de midi. Les enseignants en avaient été avertis par les parents. À l'époque, et même au cours des années suivantes, la petite demoiselle parle peu de sa maladie. "Les copines qui venaient dormir à la maison étaient les seules à savoir. Volontairement, je ne voulais pas évoquer le sujet. Heureusement, je pouvais espérer que ça ne se remarque pas trop. Vers 12 ans, j’ai dû prendre de fortes doses de cortisone durant 1 an suite à une infection pulmonaire importante. Et là, j'ai subi un véritable changement physique : j'étais gonflée. Ensuite, j'ai pris des antibiotiques non-stop pendant vingt ans. » A côté des soins médicaux quotidiens, Alice a vécu plusieurs hospitalisations et cures d’antibiothérapie. « J’étais hospitalisée ponctuellement durant l’enfance et l’adolescence. Adulte, je devais faire des cures d’antibiothérapie par intraveineuse environ 1 fois par an. Même si bien sûr elles étaient nécessaires et imposées par les médecins, ces cures et hospitalisations ont toujours été très compliquées à vivre pour moi, il y en a eu beaucoup trop pour moi. »
Si tu veux le meilleur pour tes enfants, tu dois d'abord t'occuper de toi
Face à cette situation, Alice bénéficie d'une habitude initiée par ses parents depuis sa prime enfance. "Le sport a fait partie de mon quotidien depuis toujours. Il m'a aidée à construire une force physique qui m'a notamment permis d'expectorer plus facilement. Trois fois par semaine, je faisais de la gymnastique rythmique sportive. Et cela a duré jusqu'à mes 18 ou 19 ans." Mais quand arrive le gâteau orné de vingt bougies, la jeune fille arrête le sport. « J’ai vécu ma crise d’adolescence sur le tard ! Ma maladie ne constituait plus ma priorité : je voulais vivre et profiter de la vie comme tout le monde. Je limitais mes soins à ce qui me semblait vraiment indispensable, à savoir les séances de kiné quotidiennes (je n’avais pas le choix vu que c’était avec mon kiné) et les médicaments par voie orale pour éviter les maux de ventre incessants. Sans surprise, ma santé a décliné…" Les impacts ont été l'augmentation de la toux, même la nuit, et par conséquent des expectorations plus fréquentes et plus gênantes au quotidien. "Les choses ont changé significativement lorsque je suis devenue maman. Mes deux fils - 5 et 7 ans - se sont imposés comme ma priorité. Et mon médecin m'a dit en substance : 'Si tu veux le meilleur pour tes enfants, tu dois d'abord t'occuper de toi'. J'ai revu mes priorités et constaté les différences d'un mois à l'autre lorsque je faisais mes soins correctement. J'ai la chance d'être bien entourée. Je suis suivie par une équipe médicale stable et, depuis 30 ans, consécutivement par deux médecins exceptionnels".
L'Association Muco : un soutien dans chacun des défis du quotidien
L'Association Muco fait partie de l'entourage direct d'Alice. "Elle offre un appui de qualité, un soutien dans chacun des défis du quotidien. Elle m'a aidée sur le plan informatif ou en m'offrant un regard extérieur sur des choix de vie. Sans oublier des aides financières, pour améliorer mon confort ou mes activités sportives. Et lorsque je rédigeais mon mémoire de fin d'études - j'étais épuisée - j'ai pu demander à quelqu'un de l'association de relire mon travail. Cela m'a beaucoup aidée".
La muco prépare le terrain à d'autres problèmes de santé
Par ses effets et les soins qu’elle requiert de façon quotidienne, la mucoviscidose s’avère une maladie d’autant plus pénible qu’elle demeure souvent invisible aux yeux des autres. En outre, elle "prépare le terrain" à d'autres problèmes de santé. "Après la naissance de mon deuxième enfant, le diabète est apparu chez moi de manière stable et définitive ». Double peine. « Mais je fais tout pour ne pas m’infliger un traitement supplémentaire. Gérer la mucoviscidose est déjà plus que suffisant. Je ne prends pas d’insuline et je fais tout pour retarder le jour où je devrai m’en injecter. J'ai choisi une autre approche associée à une vie saine. Je prends un médicament à chaque repas et je gère mon alimentation moi-même avec l'aide d'une endocrinologue".
Et les choses ne s'arrêtent pas là. "L'été dernier, on m'a diagnostiqué un problème d'ostéoporose au niveau de la colonne vertébrale". Triple peine. "Je prends des suppléments de calcium et de la vitamine D... J’ai peur pour l’avenir… Une moindre chute pourrait-elle provoquer une fracture de ma colonne ? »
Un sourire quasi permanent
"Le matin, je commence par des aérosols avant de gérer la vie de famille. Après le travail, je vais chez mon kiné. Cela fait 35 ans que j’ai 5 séances de kiné par semaine – d’ici 3 ans, j’attendrai ma 10.000ème séance. Idéalement, je précède mon rendez-vous chez le kiné par des aérosols. Tout ce temps consacré aux soins s'avère compliqué à vivre. Surtout que, fatigue aidant, je suis obligée de me coucher tôt. En général, mon heure limite, c'est 21h. Mais hier, par exemple, je suivais une formation. De retour à la maison, après avoir mis les enfants au lit, je me suis dirigée vers le mien. Il était 19h30. Et je me suis directement endormie." Cette fatigue constitue un autre aspect 'invisible' de la maladie. "Depuis la naissance des enfants, elle m'a obligée à passer à un travail à mi-temps. Je consacre les heures ainsi 'gagnées' à mes soins. Mais ce nouveau régime de travail a un important impact sur ma situation financière…". Face à une telle montagne à affronter jour après jour, Alice impressionne par son positivisme et un sourire quasi permanent. "J'ai toujours été enjouée. Je suis quelqu'un qui va de l'avant. Est-ce parce que la muco m'a façonnée ainsi depuis ma naissance ? Serais-je ainsi sans la maladie ? Je l'ignore. Tous mes choix de vie ont été faits sans penser à elle. Je n’ai jamais voulu que la maladie me définisse ou me freine". Une philosophie qui se heurte parfois durement aux réalités de l'existence. "Mon défi consiste à trouver l'équilibre entre ma vie de femme, celle de maman, mes occupations professionnelles et ma maladie". Au moment où elle termine cette phrase, Alice observe qu'elle a placé la maladie en quatrième et dernière place de son 'classement'. En dépit de son omniprésence et de ses implications durant une journée traditionnelle.
Ils vous remercient de votre soutien!